Nos propositions pour une vraie planification écologique
Le débat parlementaire, qui a débuté début octobre autour du projet de loi de finances 2024, sera la première occasion de renforcer les moyens pour le virage écologique et juste qui ne peut plus attendre
Emmanuel Macron a présenté le 25 septembre les grandes orientations proposées par son Gouvernement avec une ambition certes renforcée, mais un changement de cap qui ne se traduit pas dans les mesures proposées. Le débat parlementaire, qui a débuté début octobre, autour du projet de loi de finances 2024 sera la première occasion de renforcer les moyens pour le virage écologique et juste qui ne peut plus attendre.
Alors que le flou reste important sur les moyens législatifs et réglementaires qui seront proposés par le Gouvernement pour faire entrer dans le concret sa planification écologique, la cohérence entre les trajectoires proposées et les moyens financiers mis sur la table pour les années à venir sera un marqueur du sérieux des propositions.
Pour le Réseau Action Climat, et ses membres, la mise en œuvre d’une planification écologique ne peut être effective et réelle sans 5 piliers essentiels.
Une place primordiale pour la sobriété
La sobriété est le levier indispensable de la transition écologique, et qui doit aller bien plus loin que la “sobriété mesurée” appelée par le Président. C’est en effet le moyen le plus rapide et économique pour réduire notre impact sur l’environnement, évidemment en s’adressant en priorité à celles et ceux qui consomment le plus, que ce soit de l’énergie ou des biens de consommation.
Mesure Phare : Orienter l’offre et la production automobile vers des petits véhicules électriques accessibles et produits en France
Actuellement les constructeurs automobiles français ont choisi de produire des véhicules de haut de gamme, très lourds, polluants et chers. Aujourd’hui il existe un malus poids mais il est totalement insuffisant puisqu’il concerne moins de 2% des véhicules neufs vendus et ne concerne pas non plus les véhicules électriques, qui n’échappent pourtant pas à la tendance de SUVisation. L’État doit reprendre la main, notamment en renforçant ce malus poids, ce qui permettrait par ailleurs de dégager des financements pour accompagner les ménages aux bas revenus dans l’accessibilité à une mobilité durable.
C’est pourquoi le Réseau Action Climat propose la mise en place d’un malus poids réellement dissuasif de 1300 kilos pour les véhicules thermiques et d’inclure les véhicules électriques à partir de 1800 kilos.
Oeuvrer à la justice sociale et à l’accessibilité des pratiques écologiques
La Justice sociale et l’accessibilité des solutions doivent être au cœur de la planification écologique. Les ménages aux bas revenus doivent pouvoir bénéficier des alternatives que ce soit pour l’énergie, la mobilité ou l’accès à une alimentation saine.
Mesure Phare : Augmenter le chèque énergie et mettre en place un zéro reste à charge pour la rénovation des logements des plus modestes
D’après une étude de l’Observatoire national de la précarité énergétique (ONPE) de juin 20235, le montant nécessaire pour sortir 3,8 millions de ménages modestes de la précarité énergétique est de 759 € / an en moyenne (soit un budget de 2,9 Mds €).
Il faut donc augmenter le budget du chèque énergie à cette hauteur et indexer son montant sur les prix de l’énergie.
Mais comme la rénovation performante d’un logement est la seule solution pour faire baisser durablement les factures d’électricité des ménages, cette mesure doit être accompagnée de solutions structurelles pour sortir les ménages de la précarité ainsi que d’un plan de rénovation performante des logements avec un 0 reste à charge pour les plus modestes.
Un financement juste et équitable, avec le principe de “pollueur-payeur”
Alors que le virage écologique et social qui se dessine nécessite des investissements massifs, il est urgent de taxer les investissements dans les entreprises polluantes et climaticides et d’en finir avec les cadeaux fiscaux aux activités contribuant au dérèglement climatique. C’est le cas par exemple du transport aérien qui bénéficie d’une concurrence déloyale vis-à-vis du train.
Mesure Phare : Mettre fin aux exemptions de taxes sur l’aviation
Le rapport Pisani-Ferry et Selma Mahfouz a enfin mis un prix sur la transition écologique : au moins 66 milliards d’euros par an à l’horizon 2030, tous secteurs confondus. Faire coïncider budget de l’Etat et lutte contre le dérèglement climatique n’est donc plus une simple formule, mais une nécessité.
Pour ce faire, il est nécessaire de mettre fin aux exemptions de taxes sur l’aviation.
Les émissions des seuls déplacements en avion des ménages les plus aisés sont en moyenne équivalentes aux émissions de l’ensemble des déplacements des ménages les plus modestes . Une faible partie de la population est principalement responsable de ces émissions. Pourtant, ce mode de transport n’est quasiment pas taxé, le kérosène par exemple bénéficie encore d’un régime d’exception. Et ce contrairement au carburant des voitures ou au transport ferroviaire
L’exemption des taxes sur le secteur aérien représenterait 7 milliards d’euros de manque à gagner pour l’État. Le Réseau Action Climat propose de supprimer le régime d’exception de l’aviation et donc de taxer le kérosène ainsi que de supprimer la TVA réduite sur les billets d’avion. L’argent issu de ces 2 mesures permettrait de :
- remettre en état un réseau ferroviaire vieillissant (28 ans en moyenne)
- assurer le maintien des petites lignes,
- augmenter l’offre de transport en région et autour des grandes villes
- développer un véritable réseau de trains de nuit en France et vers l’Europe
- rendre le train plus accessible grâce à un ticket climat régional
Une rupture avec des systèmes de production intensifs : le cas du secteur agricole
Parmi les activités qui doivent fortement se transformer, l’agriculture, deuxième secteur émetteur de gaz à effet de serre en France, doit engager une mutation profonde du modèle global intensif vers l’agroécologie, en lien avec une évolution vers un régime alimentaire plus équilibré et plus sain, avec moins de produits d’origine animale et plus d’aliments végétaux de qualité.
Mesure Phare : Adopter un programme de transition vers un élevage durable
Alors que les élevages paysans sont plus résilients face aux dérèglements climatiques et aux chocs économiques, aller vers le « moins et mieux » (consommer et produire moins de bétail, mais de manière plus locale et durable) est une option sans regret pour le climat, pour les éleveurs et pour une alimentation plus saine.
Ce programme de transition devra être composé :
- d’un moratoire sur les créations ou agrandissements d’élevages industriels.
- d’un programme de soutien aux élevages durables les plus intensifs en emplois incluant une revalorisation des aides pour les élevages bovins pâturant, et un programme d’accompagnement des conversions des élevages intensifs vers des élevages durables et des installations / transmissions en élevage durable en adaptant les aides à l’installation.
Une planification des financements publics pluriannuels
Cette planification sur plusieurs années doit être cohérente avec la réduction et la fin des dépenses néfastes au climat et à la biodiversité. Elle doit comprendre l’accompagnement des acteurs et des collectivités impactés par les mesures de transition écologique planifiées.
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