Démission de Nicolas Hulot : les 4 choix à faire par le Gouvernement sur le climat

La démission de Nicolas Hulot a mis en lumière l’absence de cohérence et d’ambition de la politique menée depuis des mois par le Gouvernement sur l’enjeu climatique.

Sécheresse

La démission de Nicolas Hulot a mis en lumière l’absence de cohérence et d’ambition de la politique menée depuis des mois par le Gouvernement sur l’enjeu climatique. Depuis plus d’un an et malgré l’objectif fixé pour la France d’être neutre en carbone à l’horizon 2050, l’essentiel des arbitrages rendus a suivi une simple logique d’ajustement à la marge quand des changements structurels dans l’ensemble des secteurs émetteurs de gaz à effet de serre étaient requis.

Le Réseau Action Climat attend du Président de la République et du Gouvernement qu’ils tirent les leçons de cette démission. Partout cet été, les impacts des changements climatiques se sont fait ressentir, avec des conséquences plus ou moins dramatiques selon les endroits de la planète où ils se sont produits. Fin août, c’est la plus ancienne et épaisse couche de glace de l’Arctique, connue comme la « dernière zone de glace », qui se fissurait.

Il n’est plus question aujourd’hui de se satisfaire d’une politique des petits pas alors que le réchauffement de la planète apporte chaque jour un peu plus les preuves de sa gravité. Il est au contraire urgent de choisir et c’est la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui le Gouvernement.

1 – La loi mobilités, maintes fois repoussée, est actuellement en cours d’examen devant le Conseil d’Etat. Vidée de sa substance, elle est nettement en deçà du minimum requis pour qu’enfin dans notre pays, la mobilité signifie autre chose que la voiture individuelle pour le transport du quotidien et les camions pour le transport de marchandises. Non seulement nos modes de déplacements sont le principal responsable de nos émissions de gaz à effet de serre mais ils sont aussi un fléau en termes de santé publique. Des arbitrages sont en cours pour taxer le transport routier de marchandises, qui demeure, suite à l’abandon de l’écotaxe poids lourds, exonéré de toute contribution quant aux externalités qu’il produit. Non soumis à la hausse de la fiscalité écologique, le lobby de ce secteur continue d’enfermer notre pays dans un modèle polluant et néfaste pour la santé. Le Gouvernement mettra-t-il enfin un terme à cette situation intenable ?

2 – La stratégie nationale bas carbone (SNBC) et la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) sont toujours en cours de discussion. Ces programmations vont conditionner pour plus d’une décennie les futurs budgets carbone par secteur et le futur modèle énergétique dans lequel la France s’engagera. Le nucléaire demeure un point d’achoppement récurrent sur lequel ne pas décider revient à autoriser sa poursuite. Le Gouvernement actera-t-il enfin noir sur blanc dans la nouvelle PPE le nombre de réacteurs devant fermer sous le quinquennat ? Et permettra-t-il ainsi enfin aux énergies renouvelables et aux économies d’énergie de déployer pleinement leur potentiel dans nos territoires ? La stratégie nationale bas carbone fixera-t-elle des objectifs ambitieux de réduction des émissions dans le secteur agricole et alimentaire pour remédier à l’échec sur ce point de la loi alimentation et surtout prévoira-t-elle des mesures pour s’attaquer aux causes réelles des émissions de notre système alimentaire (élevage industriel, engrais de synthèse, évolution de la demande alimentaire) plutôt qu’aux fausses solutions (agrocarburants, séquestration du carbone dans les sols à l’aide de glyphosate) ?

3 – Des arbitrages sont en cours sur le prochain projet de loi de finances pour 2019. Si la fiscalité écologique a été augmentée à juste titre par le Gouvernement, ce dernier a fait fi des impacts sociaux qu’elle peut engendrer pour certaines catégories de ménages et des investissements dans les solutions alternatives que cette hausse requiert. Changer de paradigme dans le secteur des transports implique de développer des moyens pour « faire autrement » qu’avec la voiture individuelle. Pour cela, le Gouvernement décidera-t-il enfin de soutenir les transports en commun à hauteur de 1 milliard d’euros et de mettre en place un fonds vélo de 200 millions d’euros par an ? De la même manière, le plus gros déficit d’investissement observé aujourd’hui de la part de l’Etat dans les chantiers de la transition énergétique concerne la rénovation des logements. Le Gouvernement consacrera-t-il dans sa prochaine loi de finances un budget adapté à ce chantier ? Actera-t-il par ailleurs la hausse demandée du chèque énergie de 200 à 600 euros, seul moyen à court terme d’aider les 12 millions de français en situation de précarité énergétique à agir sur les situations de restriction et de privation de chauffage ?

4 – Les populations les plus vulnérables subissent aujourd’hui de plein fouet les conséquences du réchauffement de la planète. L’élargissement prévu de la taxe sur les transactions financières qui aurait permis de générer plus de ressources pour les aider a été retoqué fin 2017 par Emmanuel Macron. A travers le projet de loi de finances en cours d’arbitrage, le Gouvernement fera-t-il enfin le choix d’être solidaire avec ceux qui, bien que les moins responsables, sont victimes des impacts du dérèglement climatique ? Et décidera-t-il ainsi d’affecter 100% des recettes tirées de la taxe sur les transactions financières à la solidarité internationale et au climat ?

Pour le Réseau Action Climat, l’électrochoc espéré par beaucoup suite à la démission de Nicolas Hulot devra se matérialiser au plus vite à travers ces 4 choix, lourds de conséquences pour l’avenir de notre climat et des populations et aujourd’hui entre les mains du Président de la République et du Gouvernement.

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