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Pour un suivi de qualité des politiques régionales climat – énergie : quelques recommandations clés

Après avoir publié l'Observatoire des objectifs régionaux climat énergie, et alors que le projet de loi de la Convention Citoyenne pour le Climat propose de réviser les objectifs énergétiques régionaux, le Réseau Action Climat propose des recommandations concrètes pour faire un suivi de qualité des documents de planification régionaux.

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Le Réseau Action Climat a mis en ligne le 11 janvier 2021 l’Observatoire des objectifs régionaux climat énergie, qui permet de suivre dans le temps les objectifs fixés par les Régions dans leurs documents de planification. Cet outil est utile pour : 

  • juger de l’efficacité des politiques publiques de façon transparente
  • identifier les domaines pour lesquels des efforts restent à mener dans les régions
  • rendre accessibles et intelligibles au plus grand nombre des politiques structurantes 

Un suivi de qualité permet ainsi d’évaluer la sincérité des engagements affichés alors que les Régions ont un rôle clé pour lutter contre le dérèglement climatique. 

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Ce rôle clé du suivi des politiques régionales est d’autant plus important dans le contexte actuel : le projet de loi issu de la Convention Citoyenne pour le Climat intitulé “Projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets” propose de revoir les documents de planifications régionaux. Ceci afin de favoriser le développement des énergies renouvelables, le projet de loi prévoit une révision du volet énergie des Schéma régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) pour et “contribuer aux objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie”. Pour le Réseau Action Climat, cette révision du volet énergie est aussi l’occasion d’harmoniser l’exercice que représente la planification énergétique. 

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Quelques recommandations pour une planification et un suivi de qualité

L’absence de cadre méthodologique unique proposé par l’Etat pour les SRADDET

Dans le cadre de l’élaboration des schémas régionaux, un certain nombre d’indicateurs de suivi n’ont pas été accompagnés d’objectifs chiffrés ou d’hypothèses dans le scénario de référence par les régions, rendant plus difficile l’analyse des résultats. L’absence de cadre méthodologique unique pour la réalisation des SRADDET a rendu l’exercice variable d’une région à l’autre, complexifiant la possibilité de réaliser un suivi de qualité.   

Cette absence complexifie largement le suivi. comme l’explique l’Association négaWatt qui relève “l’absence d’homogénéité dans les méthodologies suivies, auxquelles viennent s’ajouter des différences dans les horizons de temps atteints par ces exercices prospectifs”, rendant l’exercice de comparaison des objectifs régionaux concaténés aux objectifs nationaux, complexe et même impossible sans hypothèses supplémentaires.

 

Ce constat est renforcé par le Baromètre 2020 des énergies renouvelables électriques en France qui témoigne “Les comparaisons d’objectifs régionaux entre eux et surtout leur mise en cohérence avec les objectifs nationaux sont rendues difficiles par des choix méthodologiques différents entre territoires. Si tous les schémas proposent des objectifs aux horizons 2030 et/ou 2050 pour les technologies renouvelables, les logiques de classifications et les méthodes d’évaluation varient d’une région à l’autre.” Le Baromètre ajoute que non seulement les méthodologies diffèrent, mais aussi “les niveaux de détails”. 

 

Ces recommandations et ce constat sont valables pour les questions énergétiques mais aussi pour les indicateurs et les scénarios climat, voire l’exercice des SRADDET de manière générale.

 Recommandations : l’Etat doit proposer un cadre clair pour la révision des SRADDET.

  • les indicateurs de suivi doivent être systématiquement accompagnés d’objectifs chiffrés (et inversement),
  • les méthodes, les périmètres de calculs et le rythme de mise à jour des indicateurs doivent être communs à toutes les Régions, et conformes aux pratiques des échelons nationaux voir européen (notamment concernant le taux d’énergie renouvelable).

Des angles morts dans les politiques régionales

Enfin, il est à remarquer que l’exercice des SRADDET laisse quelques angles morts comme par exemple les émissions importées. Il serait pertinent d’adopter une approche globale sur les émissions de gaz à effet de serre, en considérant l’empreinte carbone, les émissions indirectes pourraient être prises en compte dans les trajectoires régionales

Par ailleurs, sur le volet énergétique, la problématique des énergies fissiles et fossiles n’est abordée que de façon partielle et très inégale d’une région à l’autre. Ces enjeux devraient faire l’objet d’une analyse et d’objectifs clairs comme étant des éléments centraux composant les mix énergétiques territoriaux. Le Baromètre 2020 des énergies renouvelables électriques en France ajoute que “certaines technologies sont absentes de la majorité des SRADDET, comme la valorisation énergétique des déchets ou la valorisation de chaleur fatale”, pistes qui devraient pourtant être étudiées pour développer les énergies renouvelables. 

Enfin, il est important de s’assurer de la cohérence entre les objectifs affichés et ceux réellement atteints en réalisant un travail sur le potentiel de chacune des régions. Comme l’explique l’Association négaWatt : “c’est particulièrement criant pour l’objectif affiché de région à énergie positive ou de région 100 % renouvelable : si cet objectif est effectivement atteint dans certains cas lorsque l’on compare la production globale d’énergie renouvelable sur le territoire à la consommation dans son ensemble, il ne l’est plus du tout si on intègre une analyse plus fine, vecteur par vecteur. Cette approche plus détaillée met en lumière des productions souvent très excédentaire d’électricité renouvelable, et à l’inverse des importations nécessaires de gaz ou de carburants liquides, souvent d’origine fossile”. 

Recommandations : l’Etat et les Régions doivent inclure dans leur planification les axes suivants :

  • les émissions indirectes issues notamment de l’importation
  • pour les questions énergétiques ; le secteur du nucléaire et le secteur des énergies fossiles (production d’énergie et consommation finale)

Les différences dans les méthodes de production de données

Des différences existent entre les OREC (Observatoires régionaux énergie climat) quant au périmètre et méthodes de calculs pour réaliser le suivi. Il est ainsi plus difficile de réaliser un suivi de qualité quand les indicateurs diffèrent d’un territoire à l’autre, notamment pour avoir un suivi national. 

Une analyse des raisons de ces écarts est en cours et devrait être publiée en 2021. Ce nécessaire travail d’harmonisation des données régionales doit être soutenu et appuyé. Sans nier les inégalités des régions en termes de ressources et de potentiels, il facilitera le suivi des politiques régionales et leur articulation avec les politiques nationales. Comme l’explique le Haut Conseil pour le Climat, il est nécessaire de “1) produire régulièrement, aux échelles régionale et infrarégionale, des données de qualité harmonisées (…) pour évaluer les politiques publiques et ajuster les objectifs ; 2) rendre ces données publiques et s’appuyer sur elles pour élaborer les planifications futures”. 

Par ailleurs, les données des OREC peuvent reposer sur des bases méthodologiques différentes des objectifs apparaissant dans le SRADDET. Le cadre doit donc être harmonisé entre les OREC, mais aussi avec les Régions afin d’unifier les  méthodologies. 

Cette harmonisation devrait s’étendre au rythme de production des données qui peut varier fortement d’une région à l’autre, et ne permet pas toujours un suivi au plus près des trajectoires régionales.

Recommandations : l’Etat doit accompagner et appuyer les OREC (Observatoires régionaux climat énergie) dans la production de données en :

  • Soutenant financièrement et humainement le travail réalisé par les OREC
  • Appuyant la création d’un cadre harmonisé pour la production et la diffusion de ces données
  • Rendant ces données publiques et accessibles au plus grand nombre

Une gouvernance inclusive permettant les retours d’expérience

Enfin, faire le suivi des planifications régionales implique à la fois une inclusion des différents acteurs impliqués à l’échelle d’une Région (collectivités infra-régionales, Etat décentralisé etc.) mais aussi des acteurs issus de la société civile dont l’expertise favorise un suivi adapté et de qualité. 

Mais surtout, favoriser le dialogue entre les régions permettra de s’assurer de la cohérence de leurs contributions pour réaliser les objectifs nationaux fixés dans la stratégie nationale bas carbone (SNBC) et la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), dans un contexte où cette cohérence ne semble pas acquise pour les objectifs à long terme. 

Recommandations :

  • l’Etat doit proposer un cadre de dialogue entre les Régions pour assurer la cohérence des SRADDET avec la SNBC et la PPE
  • Les Régions doivent permettre l’inclusion des différents acteurs régionaux concernés et notamment les collectivités infrarégionales et les acteurs issus de la société civile dans le suivi de la mise en œuvre des SRADDET.
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