Élections municipales : analyse des programmes à Bordeaux

Le Réseau Action Climat publie aujourd’hui une analyse des programmes des quatre principaux candidats à la mairie de Bordeaux, au regard de leurs propositions pour faire face à l’urgence climatique et sociale.

Bordeaux

Le Réseau Action Climat publie aujourd’hui une analyse des programmes des quatre principaux candidats à la mairie de Bordeaux, au regard de leurs propositions pour faire face à l’urgence climatique et sociale. Les engagements portés par Nicolas Florian, Pierre Hurmic, Thomas Cazenave et Philippe Poutou ont été décryptés au prisme de 10 mesures concrètes à mettre en œuvre au cours du prochain mandat à la mairie bordelaise. Résultat : Pierre Hurmic se détache tandis que Thomas Cazenave et Phillippe Poutou peuvent mieux faire et que Nicolas Florian est à la traîne. 

Alors que que 85 % des citoyens mettent l’écologie au cœur des élections municipales[1], les candidats doivent s’engager sur des mesures concrètes, à mettre en œuvre durant leur mandat. Les villes françaises sont responsables de 67 % des émissions de gaz à effet de serre nationales[2] et Bordeaux est une zone très exposée au dérèglement climatique, notamment à la montée du niveau de la mer.

Le Réseau Action Climat propose un décryptage des programmes au prisme de 10 mesures concrètes et ambitieuses pour le climat et analyse si la mesure est soutenue ou non par chacun des quatre candidats.

Le futur maire de Bordeaux devra ainsi réduire les émissions de gaz à effet de serre en mettant en œuvre des mesures ambitieuses dans les secteurs des transports et de l’énergie. Bordeaux a en effet suspendu la mise en place d’une zone à faibles émissions malgré une étude démontrant les bienfaits de cette mesure pour la santé de la population[3]. Par ailleurs, la ville va devoir réduire ses consommations énergétiques et développer la production d’énergies renouvelables.

Sur les programmes publics décryptés, aucun ne comporte des mesures suffisamment ambitieuses pour réduire la place des véhicules polluants. Néanmoins, la liste menée par Pierre Hurmic (EELV / PS / PC) se détache des autres en intégrant la question climatique dans les différents secteurs (transports en commun, rénovation énergétique, gestion des déchets, etc.), et en proposant une mesure supplémentaire intéressante : celle de former les chefs de la restauration collective à l’alimentation végétale et à la lutte contre le gaspillage. Le programme de La République en Marche de Thomas Cazenave doit être précisé, notamment pour y intégrer la question centrale de la rénovation énergétique des logements. De même, si Philippe Poutou (Nouveau Parti Anticapitaliste) est le seul à se positionner pour limiter la place de la publicité dans l’espace public, des pans importants de l’action locale en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre ne figurent pas dans son programme comme la rénovation énergétique des logements en haute performance énergétique ou encore le développement des énergies renouvelables. Enfin, le programme de Nicolas Florian (Les Républicains et alliés) dénote, en ne mentionnant ni la question de la rénovation énergétique, ni la restauration collective végétarienne, bio et locale, ni la structuration de la filière agricole durable.

Ces mesures ne forment qu’un socle minimal d’actions à mettre en œuvre : pour faire face à l’urgence climatique et sociale, les futurs élus devront aller plus loin et adapter leurs politiques aux enjeux locaux. Les citoyens mobilisés partout en France se rendront dans la rue le 14 mars pour la Marche du Climat pour rappeler, à la veille du premier tour, qu’ils exigent des mesures fortes et qu’ils suivront les engagements des candidats, pour qu’au- delà de la parole, la lutte pour le dérèglement climatique se traduise en actes.

Si les candidats souhaitent préciser leurs programmes ou certaines propositions, le Réseau Action Climat publiera une mise à jour de son décryptage le lundi 9 mars.

[1] (novembre 2019, Elabe-Veolia)
[2] https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2018-07/20180704_Etude-defi-climatique-villes.pdf
[3] https://reseauactionclimat.org/classement-lutte-pollution-air/

Mise à jour du 9 mars 2020

L’évaluation de la liste EELV de Pierre Hurmic a été mise à jour pour inclure la mention d’“Interdire dans le cadre du règlement sur la publicité, les écrans publicitaires numériques et lumineux”, et l’ajout de l’instauration de deux repas végétariens par semaine dans la restauration collective. Par ailleurs, le programme sur le développement des énergies renouvelables a été précisé et inclut le soutien au développement de projets de portage de production énergétique renouvelable par les citoyens. La liste de Thomas Cazenave de La République en Marche a aussi apporté des précisions pour la restauration collective saine pour le climat en s’engageant à « 2 repas végétariens par semaine », mais aussi sur les modalités de développement du vélo en précisant que cela incluait entre autre le développement du stationnement et la multiplication par 5 des prêts de vélo. De plus, le projet d’aide à la structuration de la filière agricole durable a aussi été précisé pour aider « l’acquisition/transformation de foncier facilitant l’installation d’agriculteur/éleveur bio ». Si la politique de rénovation du programme de Thomas Cazenave a été précisée, elle ne couvre pas les 10 % de logements à rénover, nécessaire pour réduire la consommation d’énergie au rythme prévu au niveau national. De même, la politique de développement des énergies renouvelables devrait être précisée pour savoir comment « Bordeaux métropole propose une offre énergétique verte et locale aux Bordelais ». La liste des Républicains a aussi été mise à jour car le programme incluait deux mentions que nous n’avions pas intégrées : la rénovation des logements qui couvre plus de 10 % des logements et en ciblant en priorité les plus précaires, ainsi qu’une aide à l’achat des vélos à assistance électrique, permettant de couvrir tous les pans d’un plan vélo. Par ailleurs, étant donné qu’une tarification sociale et solidaire est validée et sera mise en œuvre, ainsi qu’une alternative végétarienne quotidienne dans les cantines, les mesures supplémentaires proposées par la liste ont permis de rehausser leur appréciation : ils proposent par exemple de permettre aux habitants de zones plus défavorisées d’accéder au centre-ville. Néanmoins, quelques points devraient être précisés, comme le projet alimentaire territorial pour cibler en priorité les modes de production durables, ou encore le plan de développement des énergies renouvelables pour inclure les projets citoyens, de même que l’objectif de limitation de la publicité qui devrait être étendu. Enfin, la liste du Nouveau Parti Anticapitaliste de Philippe Poutou a aussi précisé son programme concernant l’agriculture et alimentation durables qui cibleront en priorité les agriculteurs biologiques notamment le maraîchage, et développeront les repas végétariens. La liste a aussi expliqué qu’il y aurait un « un plan massif de rénovation thermique des logements » sans atteindre pour autant les 10 % de logements à rénover. De plus, si des précisions ont été apportées sur le plan vélo, celles ci ne permettent pas de savoir si le plan en question inclut des aides à l’accès au vélo (par des aides à l’achat, de la location etc.).

9-mars-bordeaux

Thomas Cazenave – La République en Marche

Le programme de Thomas Cazenave est très inégal. Il est ambitieux sur les transports en commun, les déchets (en proposant une collecte des biodéchets afin de réduire les quantités de déchets incinérés) et le moratoire sur l’installation des grandes surfaces. Mais le reste des propositions manque d’ambition. Ainsi, le programme ne contient aucune mesure pour réduire la place de la publicité et pour la rénovation énergétique des bâtiments des particuliers, notamment des ménages les plus précaires. Enfin, les questions d’agriculture et d’alimentation doivent être étendues afin de proposer des alternatives végétariennes quotidiennes ou deux repas végétariens par semaine, et les aides aux filières agricoles doivent cibler en priorité les filières agricoles durables.

Thomas Cazenave a précisé ses engagements ici, ici, ici et .

Nicolas Florian – Les Républicains et alliés

Le maire sortant Nicolas Florian prend peu en compte l’enjeu climatique dans son programme. Ainsi, ce dernier ne fait pas référence à la mise en place d’une Zone à Faibles Émissions pour réduire la place de la voiture en ville. Il ne mentionne pas non plus l’enjeu crucial de la rénovation énergétique des logements, ni la nécessaire transition écologique de nos modes alimentaires via la restauration collective. Les enjeux de lutte contre l’étalement urbain ou de réduction de la publicité ne sont pas non plus mentionnés dans le programme. Une proposition intéressante est cependant prévue quant à la collecte des déchets, qui prévoit le compostage à 100 % des déchets organiques de la ville. Le plan vélo mentionné doit être précisé pour faciliter l’achat ou la location de vélos, ainsi que les modalités de développement des énergies renouvelables.

Nicolas Florian a précisé ses engagements ici et .

Pierre Hurmic – Europe Ecologie-Les Verts / Parti Socialiste / Parti communiste français

L’alliance menée par le candidat écologiste Pierre Hurmic fait de la lutte contre la précarité énergétique un engagement fort du programme. Par ailleurs, le candidat présente plusieurs mesures pour construire la résilience alimentaire avec le soutien à la production agricole locale, la préservation du foncier et le développement du réseau de distribution à travers des épiceries sociales et solidaires dans tous les quartiers. Concernant la restauration collective, et la transition vers une alimentation plus durable et moins carnée, les engagements doivent être précisés. Une proposition intéressante néanmoins figure dans le programme pour former les différents acteurs de la restauration collective à la lutte contre le gaspillage alimentaire et à l’alimentation végétale. Seul candidat à s’engager sur l’interdiction des écrans publicitaires numériques, il est aussi le seul à proposer de “cesser toute artificialisation des sols”. Sur le volet de la mobilité durable, si le développement du vélo et des transports en commun sont des enjeux bien présents dans le programme, ce dernier reste muet sur la nécessaire mise en place d’une Zone à Faibles Émissions et la sortie du diesel.

Pierre Hurmic a précisé ses engagements ici.

Philippe Poutou – Le Nouveau Parti anticapitaliste / La France Insoumise

Le programme du Nouveau Parti Anticapitaliste met en avant les enjeux de justice sociale, mais manque de propositions concrètes et ambitieuses pour le climat. Si Philippe Poutou propose “la gratuité des transports publics comme alternative à la voiture” en développant le réseau de transports en commun, la question de la mise en place d’une Zone à Faible Émission est absente de son programme, tout comme son plan vélo qui doit être précisé. Seul candidat à se positionner pour la limitation de la publicité dans l’espace public, son programme nécessite néanmoins d’être précisé sur le volet énergétique puisque les énergies renouvelables sont absentes tout comme la question de la rénovation des logements en haute performance énergétique. Enfin, le programme nécessite de préciser comment “les alternatives végétariennes seront renforcées”, et devrait aussi mentionner la structuration de la filière agricole durable, qui n’apparaît pas actuellement.

Philippe Poutou a précisé ses engagements ici.

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