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Vers un développement harmonieux du photovoltaïque

Le gouvernement a révisé l’arrêté tarifaire “S21”, limitant le soutien au photovoltaïque individuel et aux petites toitures. Cette décision, qui réduit les objectifs de déploiement, suscite des inquiétudes dans la filière, notamment sur l’impact de cette politique pour les projets locaux et territoriaux.

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Début 2025, le ministre de l’Énergie Marc Ferracci a annoncé la révision de l’arrêté tarifaire “S21”. A travers cette révision, le gouvernement réduit drastiquement le soutien au photovoltaïque individuel, limité à l’autoconsommation, ainsi qu’au photovoltaïque sur petite et moyenne toiture. Il revient donc sur sa promesse de viser jusqu’à 7 GW/an de nouvelles capacités photovoltaïques, préférant un rythme de 5 GW/an.

La filière, qui emploie plus de 25 000 personnes, a fortement réagi, s’inquiétant de mesures brutales annoncées mais pas encore appliquées, créant dès les annonces un trou de commande, et un horizon fragilisé par des objectifs devenus trop faibles.

Pour le Réseau Action Climat, les objectifs globaux de déploiement du photovoltaïque restent satisfaisants malgré leur baisse. Cependant, nous rejetons le choix du gouvernement de favoriser les projets de grande taille, notamment au sol, et de réduire le soutien aux projets individuels et territoriaux.

La filière du photovoltaïque est en plein essor en France. De 3,4 GW installés en 2023, elle est passée à 5 GW supplémentaires en 2024. Une croissance soutenue qui a poussé le gouvernement à revoir sa feuille de route : la précédente Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) visait un rythme de 2,4 GW/an, un objectif qui sera finalement relevé à 5 GW/an dans la dernière version dévoilée de la PPE3.

Cependant, seuls 1,6 des 5 GW installés en 2024 étaient issus de grandes installations. Or, la politique publique tracée par la réforme annoncée du soutien cherche à faire porter le développement du photovoltaïque en priorité sur ces dernières. Il s’agit d’une grave erreur.

Premièrement, le solaire en petite et moyenne toiture est une énergie renouvelable largement soutenue. C’est l’énergie la plus plébiscitée dans les zones d’accélérations proposées par les communes, et la plus communément utilisée dans les projets territoriaux, portés par des collectifs de citoyens.

Soutenir les projets de petite et moyenne taille, notamment territoriaux, est impératif pour l’adhésion à la transition énergétique, puisqu’ils maximisent les retombées territoriales. En devenant des sources de revenus pour les collectivités, les projets territoriaux contribuent à la résilience budgétaire des communes. A travers l’autoconsommation individuelle ou collective, ils réduisent également les dépenses des habitants et autres acteurs (entreprises, agriculteurs, collectivités), en plus de créer de l’emploi local.

De plus, comme le souligne le CNPN, le photovoltaïque en toiture est la meilleure option énergétique du point de vue du respect de la biodiversité, avec une empreinte au sol nulle.

Pour des raisons similaires, nous demandons au gouvernement de publier au plus vite l’arrêté déterminant les modalités du soutien aux petites installations photovoltaïques au sol (moins de 1MW), attendu depuis longtemps, et ouvrant de nombreuses possibilités pour des projets territoriaux d’énergies renouvelables, notamment sur des friches.

Deuxièmement, alors que cette baisse du soutien public est justifiée par la hausse trop modeste des consommations d’électricité, l’Etat a diminué son soutien à l’électrification des véhicules et aux rénovations globales, permettant l’électrification des chauffages, dans le budget pour 2025. Le gouvernement se plaint des conséquences dont il chérit les causes. Le développement des énergies renouvelables ne doit pas faire les frais du manque de soutien public à l’électrification.

Enfin, afin d’exploiter pleinement son potentiel, le photovoltaïque ne doit pas se développer seul. Le développement de la flexibilité de la demande, du stockage, mais surtout des autres filières doit devenir une priorité du gouvernement, pour ne pas rater le tournant des renouvelables. 

L’essor de la filière photovoltaïque dans son ensemble est ainsi à mettre en regard des difficultés de l’éolien terrestre, qui lui est pourtant complémentaire. Cette filière pâtit d’un manque de soutien, à la fois réglementaire et politique, qui freine son développement, alors même que les baromètres d’opinion successifs prouvent année après année qu’elle est plébiscitée.

En somme, nous ne nous inquiétons pas tant de la baisse des objectifs globaux du photovoltaïque, que du contexte dans lequel cette baisse s’inscrit, et des segments visés par cette baisse. Il témoigne du rejet gouvernemental des énergies renouvelables, et en particulier des systèmes collectifs et décentralisés. Ce rejet n’est fondé ni en science, ni dans l’opinion publique. Nous craignons que l’obsession des économies budgétaires ne conduise à des politiques court-termistes, et ne menace à long terme la réussite de l’électrification des consommations d’énergie, et une transition juste, décentralisée, et acceptable.

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