Train [+1]
Bluesky

Trains de nuit : une fréquentation record bridée faute de trains

Après une quasi disparition, les trains de nuit jouissent d’un nouvel élan confirmé année après année, qui reste pourtant freiné par le manque de trains disponibles et les travaux la nuit. La conférence de financement des infrastructures de transports en cours est une opportunité pour que le train de nuit change d’échelle en France.

Design sans titre (19)

Des lignes saturées, par manque de voitures couchettes

2024 est une année record pour le train de nuit, avec plus d’un million de passagers transportés en France. C’est le signe d’une forte demande pour ce mode de transport. La ligne entre Paris et Toulouse a ainsi attiré près de 100 000 passagers supplémentaires entre 2019 et 2024 (+ 64 %). Elle séduit de plus en plus de voyageurs professionnels (30% des passagers en 2023), désireux d’arriver tôt à Paris ou Toulouse.

En 2024, les trains de nuit étaient remplis à 76% en moyenne, et même à plus de 80% sur les deux principales liaisons (Paris-Toulouse et Paris-Nice). De tels taux d’occupation contraignent de nombreux voyageurs à choisir un autre mode de transport, souvent plus polluant, ou à annuler leur voyage. Sur les deux seules lignes internationales (Paris-Vienne et Paris-Berlin), la fréquentation est également au rendez-vous, malgré de nombreux retards et une suppression de la circulation pendant trois mois en 2024.

Une solution pour les territoires ruraux comme pour les métropoles

Le train de nuit est une solution qui coche beaucoup de critères consensuels :

  • l’aménagement du territoire : le train de nuit est efficace pour desservir les zones enclavées (ex : Briançon) et connecter les métropoles éloignées sans avoir à réaliser une correspondance à Paris (ex : Bordeaux-Lyon)
  • l’environnement : sur les 10 principales liaisons aériennes vers l’Europe, au moins 6 pourraient se faire en train de nuit (Paris-Madrid, Paris-Barcelone, Paris-Milan, Paris-Rome, Nice-Londres, Paris-Venise)
  • le pouvoir d’achat : les billets de train de nuit sont moins chers que leurs équivalents en TGV (56€ vs 84€ pour un Paris-Toulouse), et permettent d’éviter une nuit d’hôtelSelon un sondage du collectif Europe on Rails, 72% des Français seraient disposés à prendre le train de nuit si le prix des billets était acceptable (et la liaison disponible).

Un potentiel de trafic considérable avec de la volonté politique

Pour désaturer les lignes existantes et en ouvrir de nouvelles, il est nécessaire de commander de nouvelles voitures-couchettes, au-delà des 129 voitures actuelles. La relance des trains de nuit est en effet largement incomplète : toutes les liaisons se font au départ de Paris, et les connexions avec le reste de l’Europe sont quasi inexistantes.

Le rapport explore deux paliers d’expansion d’ici 2035 :

  • 340 voitures, qui correspond à la fourchette haute de l’appel d’offre lancé par l’Etat[1] pour renouveler les trains de nuit, et rendrait possible la réouverture des lignes comme Paris-Barcelone ou Nice-Strasbourg. Ce scénario permettrait de transporter 3,6 millions de voyageurs et d’économiser 400 000 tonnes équivalent CO2.
  • 600 voitures, qui est le volume du parc suggéré par le rapport de référence du ministère des Transports sur les trains de nuit[2], avec la réouverture de lignes comme Paris-Venise ou Bordeaux-Lyon. Ce scénario permettrait de transporter 5,8 millions de voyageurs et d’économiser 800 000 tonnes équivalent CO2.

D’ici 2040, un troisième palier de 1200 voitures ouvrirait la voie à des lignes internationales sans passer par Paris (ex : Lyon-Rome, Nantes-Barcelone, Marseille-Londres). Il permettrait de transporter 12 millions de voyageurs et d’économiser 2 millions de tonnes équivalent CO2.

La fréquentation record de 2024 montre l’appétence des Français pour le train de nuit. La volonté politique a été au rendez-vous lorsqu’il s’est agi d’inverser la tendance en 2020, et relancer des lignes de nuit. Elle est nécessaire à nouveau aujourd’hui pour changer d’échelle. La conférence de financement des infrastructures de transports est une opportunité de sécuriser les financements pour construire un nouveau centre de maintenance, et porter le parc de nuit à 340 voitures au plus vite.

Trains de nuit : le réveil a sonné

[1] La fourchette basse (ou “tranche ferme”) de l’appel d’offres permet de commander 180 voitures. Un tel volume ne permettra pas d’ouvrir de nouvelles lignes, tout juste de renforcer certaines lignes actuelles (notamment car les voitures, qui jouissent de sanitaires, espace vélo et PMR, seront moins capacitaires).

[2] DGITM, Étude du développement des nouvelles lignes de Trains d’Equilibre du Territoire, 2021.

Plus d'actualités