Sommet finance en commun : les banques publiques sommées d’enfin réorienter leurs flux financiers
Les ONG demandaient des annonces concrètes et mesurables. Les banques de développement s’en sont tenues aux déclarations de bonnes intentions. Des mesures urgentes sont pourtant nécessaires pour faire face aux conséquences sociales et économiques du COVID-19 et contenir la crise climatique et l’érosion de la biodiversité.
Les ONG demandaient des annonces concrètes et mesurables. Les banques de développement s’en sont tenues aux déclarations de bonnes intentions. Des mesures urgentes sont pourtant nécessaires pour faire face aux conséquences sociales et économiques du COVID-19 et contenir la crise climatique et l’érosion de la biodiversité.
Le Sommet Finance en Commun a rassemblé pour la première fois plus de 400 banques publiques de développement – via leurs associations régionales – et les banques multilatérales de développement autour de principes communs pour une relance juste, inclusive et verte. Mais il n’a pas su traduire ces principes en engagements concrets pour réorienter les flux financiers. Le Réseau Action Climat, ainsi que 349 organisations de la société civile, avaient appelé ces acteurs à mettre fin à tout financement aux énergies fossiles, à augmenter les financements pour la transition juste, à promouvoir les droits humains et l’égalité de genre, et à s’attaquer à la crise de la dette. De ces engagements, il ne reste que des mentions vagues ou incomplètes dans le texte de la déclaration finale.
D’ici à la COP26 et au prochain Sommet Finance en Commun en 2021, les institutions publiques financières ont la responsabilité de rectifier le tir en adoptant des mesures concrètes qui permettront d’aligner dans les faits leurs activités avec l’Accord de Paris et les objectifs du développement durable.
La France doit également redresser la barre de toute urgence. En effet, le Parlement s’apprête à voter dans le cadre des discussions budgétaires une proposition du gouvernement, visant à subventionner l’exploration de nouveaux gisements gaziers à l’étranger jusqu’en 2035, en contradiction totale avec l’Accord de Paris. L’adoption de cette proposition serait complètement irresponsable de la part du pays hôte d’un sommet sur la finance.
De même, la France mettra de nouveau en jeu sa crédibilité en co-organisant le sommet marquant les 5 ans de l’adoption de l’Accord de Paris, le 12 décembre prochain. À cette occasion, elle devra mettre la solidarité internationale au cœur de ses priorités et annoncer un nouvel objectif de financement climat pour la France d’ici à 2025.
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Les citations :
Lucile Dufour, Responsable des politiques internationales au Réseau Action Climat : « Les mots ne suffisent pas pour réorienter l’ensemble des flux financiers vers la transition écologique. Pour limiter le réchauffement à 1,5°C, l’urgence est de stopper net les financements publics dans le charbon, le gaz et le pétrole. Pourtant, les banques de développement se sont contentées de vagues engagements, sans échéance, pour arrêter leurs financements au charbon et devenir 100 % compatibles avec l’Accord de Paris. On est bien loin du niveau d’ambition qui aurait dû être atteint, pour la planète et les citoyens. »
Armelle Le Comte, Responsable du plaidoyer climat à Oxfam France : « Le sommet n’a malheureusement débouché sur aucune annonce concrète permettant d’aligner les activités des banques de développement avec l’Accord de Paris. De bonnes intentions sont insuffisantes au regard de l’urgence climatique qui touche de plein fouet les populations les plus pauvres. Quant à Emmanuel Macron, très friand de ces rendez-vous internationaux sur le climat, il laisse faire les députés de sa majorité qui s’apprêtent à voter le maintien de subventions publiques pour des projets fossiles à l’étranger au-delà de 2035. Une incohérence totale ! Il devra rectifier le tir le 12 décembre prochain lors du sommet marquant les 5 ans de l’Accord de Paris. »
Valentin Brochard, Chargé de plaidoyer Souveraineté Alimentaire au CCFD-Terre Solidaire : « Alors que seuls 2 % des financements agricoles français à destination des pays du Sud ont des objectifs climatiques et que la France finance majoritairement le développement d’une agro-industrie climaticide, ce sommet aurait pu être l’occasion pour la France d’impulser une dynamique collective pour changer de cap. Si elle mentionne le climat, la déclaration du sommet sur l’agriculture ne change rien in fine. Elle ne dispose pas d’objectifs chiffrés et n’incite aucunement les signataires à exercer une vraie redevabilité sur l’impact de leurs financements. Pire, la transition agroécologique, objectif officiel de la France, et réclamée majoritairement par les organisations paysannes, est aux abonnés absents. »
Cécile Marchand, Chargée de campagne climat et acteurs publics aux Amis de la Terre France : « Les institutions financières publiques et gouvernements réunis lors de ce Sommet étaient attendus au tournant pour réorienter les flux financiers vers la transition écologique. Or, aucun engagement concret n’a été pris pour mettre fin aux subventions aux énergies fossiles. Pire, la France, en tant que pays hôte, considère que financer la recherche et l’exploitation d’hydrocarbures à l’étranger jusqu’en 2035 serait faire preuve de leadership international. Il n’y a pas de mot pour qualifier cette démission écologique. »
Léa Vernhet, Chargée de plaidoyer à CARE France : « Alors qu’il n’y aura pas de COP cette année, nous attendions cette semaine des annonces concrètes à la hauteur de la crise climatique. Mais la France et les États émetteurs tournent à nouveau le dos aux populations vulnérables, qui sont en première ligne face à l’impact du changement climatique, dont elles ne sont pas responsables ! L’AFD a signé une déclaration qui vise notamment à inclure le genre dans la réponse au changement climatique, mais aucune mesure réelle n’y est annoncée. Nous veillerons à ce que cette déclaration soit suivie de véritables actes. »
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