Résumé de notre conférence sur la gouvernance internationale du climat : tout un programme !
Ce mardi 15 décembre 2015, le Réseau Action a organisé une conférence en ligne avec l’intervention de 8 panélistes, venant de différents horizons, pour amorcer une question essentielle de 2021 et au-delà : la gouvernance internationale du climat dans la nouvelle phase de mise en œuvre de l’Accord de Paris, qui sera lancée par la COP26
Cet article vise à résumer les différentes contributions et réflexions qui se sont faites pendant cette conférence de 3 heures : l’objectif n’était évidemment pas de trouver toutes les réponses concernant l’adaptation inévitable de notre système de gouvernance au plus tard pour l’après COP26. Il s’agissait plutôt de permettre l’échange entre des ONG, des expert.e.s de la recherche et des Think Tanks, des partenaires institutionnels et des entreprises et de lancer la discussion, qui sera prolongée tout au long de 2021. Voici le lien vers l’enregistrement de la conférence : https://us02web.zoom.us/rec/play/iytiXfeptGvEjJKqOxuWmni9nOCWpVBJ7-bkQdn17XMlfzQUwpbnXnmniCRkGjMemQZ_mhWW2hE8sXhb.uFd-p6pCq7iQz6Gr?continueMode=true&_x_zm_rtaid=Y_WcQl3ITrmcd-NeTHFebw.1608216364994.0b21317bcbc02ff721a2ceaa8ce5ff55&_x_zm_rhtaid=687
Une introduction soulignant l’importance de mettre le sujet du climat au plus haut de l’agenda en 2021
La conférence a débuté avec une introduction de la part de Alexandra Deprez, chercheuse à l’IDDRI sur la gouvernance internationale du climat. Alexandra Deprez a souligné l’importance de l’année 2021 pour le climat : cette thématique doit rester au plus haut de l’agenda afin que la COP26 soit à nouveau un moment politique fort, allant vers l’action climatique et non plus seulement la négociation. Alexandra Deprez a souligné des obstacles encore bien trop pesants pour la mise en œuvre de l’Accord de Paris, qu’il faudrait au minimum réduire pour l’an prochain. Parmi d’autres, il y a la nécessité de clarifier les stratégies sur le moyen (2030) et long terme (2050), mais aussi de travailler sur l’intégration des acteurs non-étatiques et d’assurer leur redevabilité. La finance climatique, notamment concernant l’adaptation et les pertes et dommages liés au changement climatique, est un élément clé, tout comme les questions de solidarité, mais aussi l’importance des synergies avec la biodiversité. Il reste donc beaucoup de travail à faire pour avoir une gouvernance robuste, au-delà de la question du rôle futur des COPs et de la CCNUCC plus généralement.
Un premier panel : quelle vision pour la gouvernance post-COP26 ?
Après cette introduction, 3 panélistes ont présenté leurs visions de cette future gouvernance, et ont détaillé les problèmes à régler en priorité. Ce panel était composé de Paul Watksinson, membre de l’équipe de la COP21 et ancien président du SBSTA (Organe subsidiaire de conseil scientifique et technologique) au sein de la CCNUCC. Le docteur Saleemul Huq, directeur du centre International Centre for Climate Change and Development au Bengladesh, un chercheur qui a suivi toutes les COPs et qui est un conseiller de taille auprès des délégations nationales pendant les négociations. Enfin, le docteur Stefan Cihan Aykut, professeur de sociologie auprès de l’Université de Hamburg, gagnant en 2019 du prix Heinz Maier-Leibnitz pour les jeunes chercheurs / chercheuses de la Fondation Allemande pour la recherche. Mohamed Adow, directeur du think thank africain Powershift Africa, n’a finalement pas pu se joindre à nous pour des problèmes de connexion.
Conclusion : plus de moyens financiers pour le climat, plus de solidarité pour les pays impactés, d’inclusion des acteurs concernés et de redevabilité
Durant les interventions des 3 panélistes, il a été clairement démontré que les règles sont connues pour lutter contre le changement climatique, tout comme les solutions : le temps de mettre en œuvre, de concrétiser les engagements en action est venu. Et à cette fin, la finance climatique est la clé, dont pour l’instant seulement 20% est destiné à l’adaptation. Les populations les plus impactés voient leur vulnérabilité croître face aux impacts du changement climatique, et ne sont que très peu consultées par ceux et celles qui prennent des décisions politiques dans ce domaine. En plus des décideurs / décideuses traditionnels venant des Etats, les acteurs non-étatiques comme les entreprises commencent à s’engager pour le climat. Un cadre de redevabilité est essentiel pour les Etats, mais aussi pour ces acteurs non-étatiques, afin d’avoir une évaluation claire de qui fait quoi, qui ne fait pas assez, qui fait bien etc. Pour finir, un vrai travail sur les objectifs et les actions à court terme reste trop faible, alors que cette année 2020 a vu des engagements 2030 / 2050 fleurir, par exemple de la Chine ou de l’Union Européenne récemment.
Un deuxième panel : Quels acteurs pour cette gouvernance internationale du climat ?
Le premier panel a commencé à introduire d’autres acteurs n’étant ni Etats, ni onusiens, comme les entreprises par exemple. 4 panélistes ont pu présenter le potentiel des acteurs non-étatiques pour participer à la mise en œuvre de l’accord de Paris, en soulignant également les contraintes et incertitudes que ce système de gouvernance devrait prévenir dans le futur. Docteur Karl Vella, représentant le World Business Council for Sustainable Development (WBCSD) et coordonnant le travail sur la politique internationale de la coalition We Mean Business, a exposé la perspective du secteur privé. Sébastien Duyck, un expert du Center for International Environmental Law sur l’intégration des droits humains et la participation publique dans les politiques climatiques, a pu donner la perspective de la société civile et de son rôle essentiel pour assurer la mise en œuvre de l’accord de Paris. Inès Batktahoui, représentante du think tank CliMates, a expliqué pourquoi les jeunes sont importants pour la réussite de cette mise en œuvre, et comment ils peuvent être mieux impliqués. Pour terminer, Sander Chan, travaillant auprès du Global Center of Adaptation notamment sur l’engagement de tous les acteurs nécessaires pour la transition écologique, a présenté le rôle que les coalitions multi-acteurs jouent au sein de la gouvernance internationale et leur toute dernière évolution en 2020 sous l’influence de la Covid-19.
Conclusion : Une mobilisation des acteurs non-étatiques qui doit être encadrée, soutenue, transversale
Tous les panélistes ont souligné l’importance de leur secteur / type d’acteurs pour la transition écologique. Les entreprises permettent la mise en œuvre à échelle nationale et locale : cependant, le Docteur Vella a souligné que les Etats devaient établir les bons cadres et mesures aux entreprises, donner les subventions dans les bons secteurs et pour les bonnes technologies, etc. Les entreprises ont besoin donc de clarté pour investir, mais aussi de soutien notamment dans les pays en développement. Sébastien Duyck a rappelé que depuis 2015, l’utilisation des énergies fossiles n’a pas reculé : il faut donc être honnête sur un bilan plutôt mauvais sur l’action climatique, 5 ans après l’Accord de Paris. La société civile a été trop peu impliquée dans la prise de décision et la mise en œuvre des mesures. Cette participation est pourtant la garante de l’acceptabilité des mesures climatiques, et donc aussi de leur efficacité. Au sein des négociations internationales, les citoyens et citoyennes doivent être au cœur des décisions, notamment les jeunes, a complété Inès Bakhtaoui. En effet, c’est leur futur qui est négocié à la CCNUCC : ils ont un droit d’être autour de la table. Ils apportent engagement et mobilisation, comme les manifestations pour le climat l’ont démontré. Mais aussi la motivation, l’innovation, la transversalité avec d’autres questions sociales etc. Ils ne doivent pas être seulement intégrés dans la sphère politique, mais aussi dans les structures de recherche, les entreprises, etc. Pour finir, Sander Chan a assuré que les coalitions multi-acteurs jouaient déjà un rôle dans la gouvernance internationale, les engagements de divers acteurs y augmentent chaque année. Son équipe de recherche a remarqué que la Covid-19 a impacté les coalitions en termes d’activité et d’engagement, en particulier les coalitions travaillant sur l’adaptation et les pertes et dommages. Les questions de leur redevabilité, mais aussi de leur représentativité (populations vulnérables et impactés, jeunesse) restent loin d’être réglées : il va falloir pourtant le faire si les coalitions s’affirment en tant qu’outils de mise en œuvre pour l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris.
Discussions et débats
Les discussions se sont articulées autour de quelques thèmes centraux, en premier l’adaptation : comment orienter cette gouvernance internationale vers un meilleur soutien de cette thématique, cruciale pour la mise en œuvre de l’Accord de Paris ? La finance climatique paraît être un bon levier d’action. Beaucoup de questions autour de la redevabilité des acteurs non-étatiques et des coalitions ont été soulevées : comment assurer l’évaluation de leur action ? La CCNUCC n’en a ni les moyens, ni le mandat. Mais elle paraît le seul processus au sein duquel cela pourrait être organisé. Est-ce une situation à faire évoluer dans les années à venir ? Les avis divergent sur la question. Enfin, la question de la convergence des luttes parait essentielle pour une bonne mise en œuvre de l’Accord de Paris : la transition écologique ne sera pas complète si la société ne s’attaque pas à la lutte contre la pauvreté, pour l’égalité homme-femme, la lutte contre le racisme etc. Le concept de transition juste est central est devrait être la clé de voute de cette gouvernance internationale du climat adaptée, avec plus d’acteurs engagés et un vrai cadre de redevabilité pour tous.
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