Europe

Lettre ouverte : La réforme des règles budgétaires menace la résilience et la cohésion européennes

Le Réseau Action Climat, Deutscher Naturschutzring, FiscalFuture et France Nature Environnement appellent leurs ministres des finances à se mettre d'accord sur un accord ambitieux sur la réforme des règles budgétaires européennes, à un moment où l’investissement dans les biens publics est plus qu’essentiel pour protéger les citoyens.

Bruno Le Maire
Bruno Le Maire, Minister of the Economy, Finance and Recovery of France speaking to the press at the World Economic Forum Annual Meeting 2023 in Davos-Klosters, Switzerland, 20 January. Congress Centre. Copyright: World Economic Forum/Ciaran McCrickard

Monsieur Bruno Le Maire,

Ministre de l’économie et des finances 

Monsieur Christian Lindner, 

Ministre des finances

Dans une tentative précipitée de conclure un accord sur la réforme des règles budgétaires européennes, les ministres des finances européens pourraient entraver le déploiement de la transition juste et écologique en Europe. Le dernier compromis limite la capacité d’investissement des pays sans tenir compte du besoin d’investissements verts et sociaux. Le Réseau Action Climat, Deutscher Naturschutzring, FiscalFuture et France Nature Environnement appellent leurs ministres à se mettre d’accord sur un accord ambitieux, à un moment où l’investissement dans les biens publics est plus qu’essentiel pour protéger les citoyens.

Ce vendredi, les ministres des finances de l’UE doivent s’accorder sur un compromis concernant la réforme des règles budgétaires européennes qui servira de base aux négociations avec le Parlement européen. Le compromis proposé par la présidence espagnole n’améliore qu’à la marge les règles budgétaires actuelles. Celles-ci ne préserveront pas la viabilité de la dette à long terme et empêcheront la plupart des pays européens d’atteindre leurs objectifs climatiques, sapant ainsi la résilience et la cohésion européennes. 

Nous sommes particulièrement préoccupés par : 

  1. Des objectifs numériques en contradiction avec les objectifs de l’UE. Les critères proposés, qui exigent des pays qu’ils réduisent leur dette et leur déficit d’un montant minimum, risquent de limiter la capacité des gouvernements à utiliser les investissements publics, en particulier les investissements verts qui ont des multiplicateurs fiscaux élevés. Cela est particulièrement problématique à l’approche de la mise en œuvre du marché carbone 2 en 2027, qui fera peser une charge disproportionnée sur les ménages à faible revenu. Retenir ces investissements est avant tout une chose coûteux au long terme.
  1. Des ambitions réduites en matière de réforme et d’investissement. Le compromis supprime également l’obligation pour les Etats de proposer de nouveaux investissements et de nouvelles réformes dans leur premier plan structurel national-budgétaire, afin de bénéficier d’une première extension de la trajectoire d’ajustement pour la réduction de la dette. Cela supprime un outil crucial pour encourager les réformes et les investissements supplémentaires pour atteindre les objectifs de l’UE et déployer une transition juste. 
  1. Priorité donnée aux dépenses de défense par rapport aux autres objectifs de l’UE. Le compromis suggère que les investissements dans la défense soient considérés comme un facteur pertinent à prendre en compte avant de déclencher une procédure de déficit excessif à l’encontre d’un pays, au contraire de l’action en faveur du climat. Au lieu de cela, les investissements dans toutes les priorités de l’UE devraient être considérés comme des facteurs pertinents à prendre en compte avant de lancer une telle procédure. 
  1. Manque d’espace pour des investissements de qualité dans les priorités de l’UE et manque d’incitations pour des investissements de qualité. Enfin, les règles n’incluent pas de critères d’évaluation supplémentaires pour garantir la qualité des investissements publics, tels que le principe de ne pas causer de préjudice important (DNSH). 

Nous pensons qu’un compromis mieux pensé doit être mis sur la table. Nous craignons que les propositions actuelles ne compromettent les effets du plan de relance, ne freinent la transformation de nos économies et de nos sociétés, et fragilisent les citoyens à un moment où ils ont plus que jamais besoin d’être protégés contre des chocs récurrents. A l’heure où l’extrême droite monte en Europe, les investissements dans les biens publics sont essentiels pour renforcer la cohésion sociale et réduire les craintes de déclin socio-économique. Un retour de l’austérité mettrait en péril la cohésion sociale en Europe.

Nous vous demandons donc instamment de prendre le temps nécessaire pour parvenir à un accord qui reflète les leçons tirées de la crise économique et financière et qui donne aux gouvernements les outils nécessaires pour investir dans la réalisation des objectifs climatiques, sociaux et économiques de l’UE.

Signataires

  • Réseau Action Climat
  • Deutscher Naturschutzring
  • FiscalFuture
  • France Nature Environnement
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