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La transition énergétique en Europe : l’heure du choix

Le 18 décembre, les Ministres européens de l’énergie devront prendre position sur le « paquet énergie » européen, véritable boussole de la transition énergétique en Europe pour les dix prochaines années.

Parlement UE

S’ils brillent dans l’affichage politique, les gouvernements nationaux menés par la Présidence estonienne du Conseil rivalisent pourtant d’imagination pour maintenir le statu quo énergétique en Europe et rater ainsi la marche de la mise en œuvre de l’accord de Paris.

Ce paquet législatif détermine non seulement le niveau de réduction de la consommation d’énergie et de développement des énergies renouvelables, mais aussi les conditions pour transformer notre modèle énergétique. Il peut donc être un outil puissant pour lever les freins à la transition énergétique en Europe et en France, créer des milliers d’emplois non délocalisables, réduire la précarité énergétique des Européens et appliquer l’accord de Paris sur le climat.

Les députés européens des commissions Énergie et Environnement du Parlement européen se sont saisis du paquet énergie pour envoyer un signal fort en faveur d’une transition réussie. Maintenant c’est au tour des Etats européens de prendre position afin de finaliser les textes législatifs.

Cependant, les gouvernements nationaux ne l’entendent pas de la même oreille et font leur possible pour s’affranchir des objectifs climatiques et énergétiques européens et protéger les énergies fossiles et fissiles comme le charbon ou le nucléaire. Cette stratégie du « tous perdants » met en danger la mise en œuvre de l’accord de Paris en Europe.  

A la veille d’une négociation houleuse entre les Etats européens, le Réseau Action Climat appelle la France à donner un coup d’accélérateur à la transition énergétique en Europe, en inscrivant l’ambition climatique du Président de la République dans le paquet énergie européen.

Mettre en œuvre l’accord de Paris en Europe

Le Réseau Action Climat estime que pour mettre en œuvre l’accord de Paris sur le climat, l’Union européenne doit se doter d’un cap de neutralité carbone pour 2050 et développer l’ensemble des outils et règles du jeu pour que tous les Etats contribuent collectivement à cet objectif.

La semaine dernière, les députés européens ont envoyé un signal fort en faveur de ces deux conditions à la mise en œuvre de l’accord de Paris en votant pour une gouvernance européenne de l’énergie qui évalue et corrige la trajectoire de l’Union européenne et de ses Etats membres dans l’atteinte des objectifs climatiques et énergétiques pour 2030.

La France est également sur cette ligne et souhaite des outils européens robustes pour que tous les Etats prennent leur juste part à l’engagement européen en matière d’énergies renouvelables, d’efficacité énergétique et de réductions des émissions.

Néanmoins, au lendemain du « One Planet Summit », la plupart des gouvernements nationaux s’apprête à détricoter les règles du jeu européennes afin d’échapper à leurs responsabilités dans la transition énergétique européenne. Il est donc indispensable que la France réussisse à convaincre ses partenaires européens de la plus-value d’une gouvernance européenne de l’énergie.

Accélérer le développement des énergies renouvelables en Europe

Le paquet énergie fixe un objectif de 27% d’énergies renouvelables en Europe pour 2030, ce qui serait un recul conséquent face au développement du marché des renouvelables. Avec la réduction drastique du coût d’installation, un objectif de 45% d’énergies renouvelables en 2030 est largement réaliste. Pour le Réseau Action Climat, il est le seul qui permettra d’enclencher la transition de notre modèle énergétique. Les députés européens n’ont fait que la moitié du chemin en votant un objectif de 35% d’énergies renouvelables d’ici à 2030. Malheureusement les gouvernements nationaux, dont la France, souhaitent maintenir l’objectif de 27%, pourtant obsolète. La France a d’ailleurs accumulé un retard un retard significatif sur ses objectifs 2020 et fait partie des 4 mauvais élèves européens sur les énergies renouvelables.

Par ailleurs, le Réseau Action Climat estime que les mécanismes de soutien financiers nationaux sont indispensables pour accélérer le développement des renouvelables. Portées par les députés européens et la France, ces aides financières nationales pour les renouvelables sont malheureusement loin de faire l’unanimité au sein des Etats membres, ce qui risque de mettre à mal la filière en Europe.

Autre point de tensions dans les négociations : les énergies citoyennes. Le Réseau Action Climat est vigilant à ce que toutes les conditions soient réunies pour soutenir le développement des énergies citoyennes. Ainsi, permettre aux citoyens de bénéficier d’un statut avantageux pour revendre l’énergie produite accélérera la transition énergétique et l’autoconsommation partout dans les territoires.

Sortie des agrocarburants de première génération

Alors que la Commission européenne souhaitait limiter l’usage des agrocarburants dans le secteur du transport à 3,8% en 2030, les Etats membres, dont la France, soutiennent le maintien d’un objectif d’incorporation élevé (7%) d’agrocarburants issus de cultures alimentaires. Cette position est inacceptable aux vues des impacts climatiques et alimentaires que la culture d’agrocarburants engendre, en particulier lorsqu’il s’agit d’huile de palme.

Le Parlement européen a voté en faveur de la suppression des agrocarburants de première génération à l’horizon 2030 et de ceux issus de l’huile de palme dès 2021. Le Réseau Action Climat soutient cette démarche et demande à la France de s’opposer aux agrocarburants à forts impacts climatique.

Mettre fin au soutien aux énergies fossiles

Les gouvernements nationaux souhaitent maintenir la possibilité d’investir massivement de l’argent public dans des centrales fossiles ou nucléaires à travers un mécanisme censé assurer la sécurité énergétique du continent européen. A l’heure d’appliquer l’accord de Paris, il est intolérable que les Etats puissent soutenir les énergies fossiles, principales causes du réchauffement climatique. A ce sujet, la France a adopté une position ferme qui vise à exclure toutes les centrales à charbon de ce mécanisme de soutien. Le Réseau Action Climat soutient cette démarche, mais souhaite souligner le double jeu que mène la France sur ce dossier.

En effet, la France refuse de se débarrasser de ce mécanisme afin de continuer à subventionner son parc nucléaire. Environ un milliard d’euros du contribuable pourrait être utilisé pour maintenir en vie des centrales nucléaires vieillissantes sans répondre au réel problème des pics de la demande. Seul le développement massif de l’efficacité énergétique est la réponse adaptée à cette problématique.

Le Réseau Action Climat appelle donc la France à arrêter de défendre son statu quo énergétique dans les négociations européennes et à refuser ce type de mécanismes.

Réduire la consommation d’énergies et lutter contre la précarité énergétique en Europe

L’objectif européen d’efficacité énergétique de 30% d’ici à 2030 est largement insuffisant pour enclencher la rénovation des bâtiments, réduire notre consommation d’énergie et lutter efficacement contre la pauvreté énergétique en Europe.

Les députés européens l’ont bien compris et ont adopté un objectif minimum d’économie d’énergie de 40% en Europe pour 2030, décliné en objectifs contraignants dans chaque pays européen. Le Réseau Action Climat salue cette avancée et demande aux Etats membres et à la France de s’engager sur le chemin des économies d’énergie, seule solution sérieuse pour  enclencher la transition énergétique en Europe.

Règlement de la gouvernance de l’Union de l’énergie – Position du Réseau Action Climat
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