La grande distribution, alliée ou frein à une alimentation saine et durable pour toutes et tous ?
Alors que le Gouvernement a lancé la consultation sur une première mouture peu ambitieuse de Stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), le Réseau Action Climat publie aujourd’hui la seconde édition de son évaluation de huit enseignes de supermarchés.

Cette évaluation de huit enseignes de supermarchés (Aldi, Auchan, Carrefour, Coopérative U, Intermarché, Leclerc, Lidl, Monoprix) a été réalisée selon des indicateurs relatifs au climat et à la promotion d’une alimentation saine et durable. Elle est complétée par un panorama inédit des bonnes pratiques des supermarchés en Europe et des recommandations pour les pouvoirs publics, les distributeurs et les industriels, co-construites avec les acteurs économiques, sur la base de 55 entretiens avec des parties prenantes du secteur.
En 2025, le constat sur l’alimentation des Français reste similaire à celui de 2023. La précarité alimentaire a été aggravée par deux ans d’inflation, les maladies chroniques liées à l’alimentation ont progressé, une partie du secteur agricole traverse une période de crise, tandis que les importations de viande augmentent. Par ailleurs, l’alimentation continue de représenter 24% de nos émissions de gaz à effet de serre, dont les deux tiers proviennent de notre consommation de viande et de produits laitiers.
La grande distribution, en progrès mais toujours en retard sur la transition alimentaire
Alors que 78 % des ventes de produits alimentaires consommés à domicile sont réalisées dans des grandes surface, la grande distribution a un rôle important à jouer pour permettre la transition alimentaire, c’est-à-dire l’accès à une alimentation saine, durable, choisie et rémunératrice, notamment grâce à son pouvoir sur l’amont des filières comme sur les consommateurs.
Par rapport à 2023, les enseignes ont réalisé des progrès en matière de transparence, d’engagements et de plans d’action. Toutefois, on observe encore un décalage important avec leurs pratiques réelles qui ne prennent pas encore ou très peu en considération les enjeux écologiques et de santé publique. Dans les rayons et dans les catalogues de promotions, la viande et les produits carnés ultra-transformés restent fortement surreprésentés au détriment des aliments végétaux de qualité. Dans les rayons, la proportion de plats préparés sans viande ni poisson se maintient au niveau bien bas de 8% – comme en 2023. Ces pratiques sont en contradiction avec les recommandations alimentaires officielles, qui préconisent de limiter la viande et la charcuterie, et de consommer davantage de protéines végétales ; elles nuisent à la santé des consommateurs mais aussi aux éleveurs, dont la rémunération est rognée par la course aux prix bas.
Comparaison avec les pays européens : l’inaction coupable des pouvoirs publics
La comparaison avec les distributeurs ailleurs en Europe montre que les enseignes françaises sont en retard mais notre recherche met aussi en exergue que le degré d’avancement des distributeurs allemands, britanniques ou néerlandais s’explique en partie par l’adoption par les pouvoirs publics de lois et de stratégies ambitieuses – ce qui fait largement défaut en France.
Des distributeurs demandeurs d’actions fortes de l’Etat en faveur d’une alimentation plus végétale et de l’agroécologie
De plus, notre étude des freins et des leviers, basée sur 55 entretiens avec des experts et des professionnels du secteur dont plusieurs DG et PDG, aboutit à cette même conclusion : si les distributeurs doivent agir davantage, la transition alimentaire n’aura pas lieu sans les pouvoirs publics. Les distributeurs s’accordent sur la nécessité que l’Etat définisse un cap et un cadre clair en faveur de la transition, et mène des politiques ambitieuses pour : promouvoir une alimentation plus végétale avec moins de viande, mais de meilleure qualité et produite en France ; déployer l’étiquetage environnemental ; renforcer les capacités financière des ménages pour accéder à une alimentation de qualité.
Les distributeurs reconnaissent également le besoin de co-construire collectivement – acteurs économiques, pouvoirs publics et société civile – des règles du jeu et des objectifs communs pour transformer le secteur agroalimentaire. Parmi les chantiers identifiés, la nécessité d’améliorer la durabilité de l’offre et de mettre les pratiques commerciales de mise en avant (têtes de gondole, catalogues, etc.), de marketing et de promotions au service de la transition vers une alimentation saine, durable et accessible à toutes et tous.
Alors qu’il publiera avant l’été la version définitive de la Stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), le gouvernement serait avisé d’intégrer ces demandes partagées par la société civile et les distributeurs. Pour le Réseau Action Climat, il est également indispensable que la SNANC interdise la publicité et le marketing pour les produits trop gras, sucrés et salés, en particulier lorsque ces activités ciblent les enfants. La Stratégie doit aussi fixer des objectifs chiffrés de réduction de la consommation de viande, assortis de mesures pour réduire les importations, favoriser la consommation de viande de qualité produite en française et garantir aux éleveurs une juste rémunération, tout en développant la consommation et la production légumineuses.
https://pourdessupermarchesdurables.org


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