La COP 28, à l’ère de l’ébullition climatique
“Nous sommes entrés dans l’ère de l’ébullition mondiale” clamait Antonio Guterres, secrétaire général des Nations Unies face aux États membres de l’ONU. Des États qui devront montrer patte blanche à la COP28, qui s’ouvrira le 30 novembre à Dubaï, pour deux semaines de négociations aux enjeux cruciaux. Zoom sur l’agenda de la COP28.
Pourquoi nous continuons d’aller à la COP ?
Frustrantes, lentes, phagocytées par les lobbyistes sont quelques-uns des qualificatifs qui reviennent régulièrement à propos des COP. C’est souvent vrai, d’autant plus que la COP28 sera présidée par Sultan Ahmed Al Jaber, dirigeant de la plus grande compagnie pétrolière et gazière émiratie, l’ADNOC, qui continue d’investir massivement dans le développement des énergies fossiles.De quoi interroger la pertinence et le crédit attribué à cet espace de négociation climatique, confronté à autant de paradoxes.
Pour autant, garantir cet espace est essentiel : il n’existe aucun autre espace de négociation sur le climat d’une telle envergure, qui permette l’adoption d’un cadre mondial pour l’action climatique des États. Comme par exemple l’Accord de Paris signé à la COP21 en 2015, qui fixe l’objectif de limiter par tous les moyens le réchauffement terrestre à +1.5°C.
Difficile donc pour les ONG de bouder cet espace, d’autant que leur rôle est crucial. `A la COP, il s’agit pour la société civile de représenter et défendre les droits des populations et communautés les plus vulnérables et impactées par le changement climatique, mais aussi de dénoncer les lobbyistes de plus en plus présents, et le greenwashing des États et multinationales. Ne pas y aller, c’est faire sauter l’une des dernières barrières qui protègent les plus vulnérables face aux intérêts des plus riches et pollueurs.
Pas question donc d’abandonner les COP, bien au contraire, d’autant que l’agenda de cette COP28 s’annonce chargé. Tour d’horizon des priorités de l’agenda des négociations de la COP28.
Bilan Mondial : 8 ans après l’Accord de Paris, l’heure des comptes.
8 ans après l’adoption de l’accord de Paris à la COP21, l’heure est au bilan. Suite à la publication du 6e rapport du GIEC alertant sur l’accélération du changement climatique et à la collecte de tous les plans d’actions pour le climat mis en œuvre par chaque pays ces dernières années, le “bilan mondial”, véritable évaluation de l’action climatique mondiale, va confronter les efforts réalisés à l’ampleur de l’action nécessaire pour garder l’objectif de +1.5°C à porté de main ou en vie .
Et la marche va être haute, puisque nous nous dirigeons actuellement vers un réchauffement terrestre avoisinant les +3,2°C d’ici 2100. Les Etats devront ainsi collectivement revoir leur copie à la hausse en intégrant plus de mesures d’atténuation (visant à réduire les émissions des secteurs les plus pollueurs, les transports, l’agriculture, l’énergie par exemple) et d’adaptation (visant à adapter les infrastructures humaines aux changement climatique, habitat ou agriculture par exemple).
📢 Le rôle des ONG. Ce Bilan Mondial cristallise tous les enjeux de justice climatique. Nous veillerons à ce que les États les plus riches et historiquement responsables des émissions de gaz à effet de serre soient les premiers à mettre en œuvre des actions à la hauteur de leur responsabilité, et à financer l’action climatique, y compris pour les pays du Sud, qui pour la plupart ne pourront pas atteindre les objectifs sans plus de soutien technique et financier de la part des pays riches.
📢 Le rôle des ONG
Ce Bilan Mondial cristallise tous les enjeux de justice climatique. Nous veillerons à ce que les États les plus riches et historiquement responsables des émissions de gaz à effet de serre soient les premiers à mettre en œuvre des actions à la hauteur de leur responsabilité, et à financer l’action climatique, y compris pour les pays du Sud, qui pour la plupart ne pourront pas atteindre les objectifs sans plus de soutien technique et financier de la part des pays riches.
Objectif 2050 : Sortir de toutes les énergies fossiles, de façon juste et équitable
Acter la fin des fossiles à Dubaï peut prêter à rire jaune. Pourtant, l’avenir des énergies fossiles occupera bien l’attention des négociateurs de la COP28. Et cette discussion donnera le ton sur le crédit que les États accordent encore à l’accord de Paris. Pour se donner une chance de rester sous la barre du 1,5°C, les Etats doivent adopter dès maintenant un arrêt définitif de l’exploitation de toutes les énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz) d’ici 2050 au plus tard.
La question n’est à ce stade plus de savoir s’il faut oui ou non sortir des énergies fossiles, mais quand et comment.
Les enjeux autour de la fin des fossiles :
Assurer une sortie équitable des énergies fossiles : Face à la sortie des fossiles, tous les États ne sont pas égaux, ni en termes de consommation, ni en termes de capacité financière et technique de substituer ces énergies par les énergies renouvelables. Ce sera aux pays les plus responsables du changement climatique et en capacité d’agir de sortir des énergies fossiles les premiers et de soutenir financièrement la transition hors des fossiles des pays du Sud
Anticiper les conséquences de cette sortie :
-D’ici 2030, tripler la capacité de production des énergies renouvelables pour satisfaire la demande mondiale.
-Organiser une réduction globale de la demande en énergie par deux moyens : la sobriété (réduction de la consommation) d’énergie et l’efficacité énergétique (minimiser l’énergie nécessaire au fonctionnement de nos biens et infrastructures)
📢 Le rôle des ONG
Notre rôle est d’assurer un respect de la justice climatique entre pays du Nord et pays du Sud. Par ailleurs, nous veillerons à ce que les mirages technologiques coûteux et incertains comme la capture et le stockage du carbone ne repoussent pas la date de sortie des énergies fossiles.
La France est accro aux énergies fossiles : l’année dernière, 67 milliards d’euros étaient dépensés par la France pour soutenir les énergies fossiles. Sans compter le fleuron national du secteur de l’énergie TotalEnergies, 33 méga-projets pétroliers et gaziers qui pourraient encore émettre plus de 90 milliards de tonnes de CO₂e. si toutes leurs réserves étaient exploitées, selon les calculs estimatifs de Greenpeace France.
Pays riches et responsables du changement climatique, payez votre dette climatique
Financer l’action climatique : la confiance entre Nord et Sud en jeu
Le changement climatique met en lumière la fracture grandissante entre pays riches et pays en développement : au Nord, des pays riches, historiquement responsables des émissions de gaz à effet de serre. Au Sud, des pays bien plus vulnérables, moins responsables des dégâts qu’ils subissent et disposant de moyens financiers et techniques plus faibles pour faire face à la crise climatique ( atténuer, adapter ou bien payer les coûts des pertes et dommages).
Pour combler ce déséquilibre, les pays du Nord se sont engagés en 2009 à verser au pays du Sud 100 milliards de dollars par an pour soutenir les actions d’adaptation et d’atténuation Or, trois ans après l’échéance qu’ils s’étaient fixés, les pays développés n’ont toujours pas mobilisé cette somme. Et rien ne garantit que l’objectif sera atteint en 2023. Non seulement cette situation nuit gravement à la confiance entre les États mais elle alourdit la facture des impacts pour les pays et communautés les plus vulnérables.
Le retard est tel que les pays du Nord devront atteindre trois objectifs pour la COP28 :
- honorer la promesse de verser ces 100 milliards annuels, sans déléguer cette responsabilité au secteur privé.
- augmenter drastiquement cette somme, car les besoins actuels sont bien plus importants qu’en 2009, au moment de l’adoption de cette promesse. Le programme des Nations Unies pour l’environnement estime par exemple à 300 milliards de dollars par an les financements nécessaires pour que les pays du Sud puissent s’adapter correctement au changement climatique en 2030
- S’engager à verser ces financements sous forme de dons et non de prêts, pour ne pas creuser la dette des pays du Sud, souvent déjà importante.
Pertes et dommages : vers une décision historique pour réparer les dégâts ?
Le 6e rapport du GIEC est incontestable : les événements climatiques extrêmes sont plus fréquents, et plus intenses. Ces ouragans, incendies, désertifications, tsunamis touchent d’abord les pays les plus vulnérables et engendrent des frais colossaux. À la COP27, un fonds dédié au financement de ces pertes et dommages engendrés par ces catastrophes a été acté. A la COP28, c’est sa mise en œuvre opérationnelle et une obligation pour les pays et acteurs privés les plus riches et les plus pollueurs d’y contribuer.. Tout l’enjeu sera de répondre réellement aux besoins des pays et populations victimes du changement climatique, qui pourraient s’élever à 580 milliards de dollars d’ici 2030.
1er jour de la #COP28, 1er acte fort : Le texte qui permet la mise en œuvre du fonds pertes et dommages a été voté ! Un signal fort en début de COP@FannyPetitbon de @CAREfrance nous raconte ce combat même si le texte comporte encore des lacunes👇 pic.twitter.com/97rjL73F7m
— Réseau Action Climat (@RACFrance) November 30, 2023
📢 Le rôle des ONG
La Justice climatique est un enjeu prépondérant pour assurer une action équitable et une responsabilité équitable et partagée dans la lutte contre le changement climatique. A la COP28, on court le risque d’une fracture encore plus grande entre pays du Sud et pays du Nord si ces derniers n’honorent pas leurs promesses, qui pourrait compromettre la confiance et les négociations dans leur ensemble. Nous soutiendrons donc les demandes de financement des pays du Sud en mettant la pression sur les pays responsables, dont la France fait partie pour financer l’atténuation, l’adaptation et contribuer substantiellement au Fonds pour les Pertes et Dommages.
Taxons les entreprises des énergies fossiles : nos vies avant leurs profits
Nous demandons aux leaders politiques qui se réuniront à Dubaï en novembre de taxer les super-pollueurs : les entreprises du pétrole, du gaz et du charbon qui condamnent la planète tout en continuant à s’enrichir. Nous relayons cette demande au travers d’une pétition, Taxons les entreprises des énergies fossiles : nos vies avant leurs profits, qui permettrait de collecter une partie de l’argent nécessaire pour approvisionner le fonds des pertes et dommages.
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