La Commission européenne garde le cap sur le climat dans sa proposition de Pacte industriel propre mais sans se donner les moyens de son ambition
Ce mercredi 26 février, la Commission européenne a publié sa proposition de Pacte industriel propre pour renforcer sa compétitivité et sa décarbonation. Le climat est bien présent dans la feuille de route, centrée autour de l’objectif de réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre pour 2040 ainsi que l’économie circulaire.
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Cependant, il est très problématique que la Commission européenne ne se donne pas les moyens de son ambition en ne proposant pas de financement additionnel, ni de mesure de réduction de la demande d’ampleur ainsi que sur la transition juste pour les travailleurs et les emplois, et en vidant de leur contenu les lois adoptées sur la finance durable qui avaient pour objectif d’orienter les financements privés vers la transition écologique.
Le Pacte industriel propre garde le cap sur le climat mais…
La Commission européenne envoie un signal globalement rassurant en mettant la décarbonation au cœur du Pacte industriel propre. C’est une opportunité pour renforcer la souveraineté énergétique et industrielle de l’Europe tout en accélérant sa décarbonation. La mention de l’objectif de baisse des émissions de gaz à effet de serre de 90 % d’ici 2040, est positive bien qu’insuffisante. Complètement à contre-courant de la décarbonation, la Commission prévoit de dédier des financements à des infrastructures d’exportation de gaz naturel liquéfié à l’étranger (Qatar, Etats-Unis). C’est un gaspillage d’argent public massif qui ne garantira pas une baisse des factures pour les ménages et qui enfermera pour au moins 20 ans l’Europe dans la dépendance au gaz fossile.
Des mesures insuffisantes pour réduire la demande en énergie et en matières premières
Si le Pacte affirme la volonté de l’UE de devenir leader mondial de l’économie circulaire d’ici 2030, il n’évoque pas de mesures d’ampleur suffisante pour déployer la sobriété en énergie et en matières premières pourtant indispensable pour renforcer la souveraineté européenne et limiter la facture énergétique des 27 Etats-membres et de 300 millions de consommateurs. Le Pacte industriel propre devrait notamment prévoir d’intégrer des objectifs de diminution de l’utilisation des ressources dans la loi sur l’économie circulaire (réduction contraignante de l’empreinte matérielle de l’UE à 5 tonnes par habitant d’ici 2050, contre 14,8 tonnes en 2022) et modifier la formulation actuelle qui la réduit aux matières premières « précieuses et rares ».
Un besoin impérieux de prendre en compte les travailleurs et de créer de nouvelles recettes budgétaires
La Commission européenne veut introduire des conditionnalités aux aides d’Etat relatives à des économies d’énergies et des réductions d’émissions de l’industrie mais ne prévoit pas de clauses sociales permettant de garantir une transition juste. C’est donc les travailleurs et les territoires en mutation industrielle qui risquent d’être abandonnés. Pour éviter cette situation, il est nécessaire, en plus de conditionnalités sociales strictes aux aides publiques destinées aux industriels, d’inclure la société civile et les syndicats dans l’élaboration des textes du Pacte industriel propre pour ne plus laisser uniquement les industriels dicter une politique qui ne profitera pas au plus grand nombre. De plus, la Commission européenne annonce de mobiliser 100 milliards d’euros pour financer la décarbonation de l’industrie et les technologies propres mais sans évoquer la création de nouvelles ressources propres comme par exemple une taxe sur les profits de l’industrie fossile qui pourrait rapporter 7.5 milliards d’euros par an. Il est impératif que la Commission européenne explicite comment elle prévoit de financer ces nouveaux investissements pour garantir le déploiement de cette stratégie.
Un pas en avant, mais deux pas en arrière avec le paquet Omnibus
La Commission européenne n’a pas peur des contradictions. Le même jour, elle reconnaît le besoin de lier souveraineté industrielle et climat tout en faisant machine arrière en proposant dans son paquet Omnibus de revenir sur les obligations de textes déterminants comme le devoir de vigilance des entreprises et le reporting extra financier sur la durabilité des entreprises. Sous couvert de “simplifier” la vie des entreprises, la Commission européenne propose dans les faits une suppression massive de normes d’intérêt public qui visent à prévenir et à réparer les atteintes aux droits humains et à l’environnement causées par les entreprises.
Que doit-on comprendre ? Nous appelons la Commission européenne à clarifier la marche à suivre en Europe et à se donner les moyens de son ambition.
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