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Les émissions de CO2 des voitures neuves ne baissent plus en usage réel

Le décalage entre les émissions de CO2 proclamées par les constructeurs automobiles et les performances obtenues en usage réel est devenu un véritable gouffre : en 2015, la consommation en usage réel dépasse de 42% en moyenne les valeurs officielles. Mercedes se distingue par des écarts supérieurs à 55% qui restent en partie inexpliqués.

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Les émissions de CO2 des voitures neuves ne baissent plus en usage réel

Alors que la situation empire, le système de test doit être profondément reformé et la réglementation renforcée pour endiguer ce phénomène qui nuit tant à nos objectifs climatiques qu’aux consommateurs et à la sécurité énergétique de l’Union européenne.

En manipulant les tests, les constructeurs automobiles mettent en péril les objectifs climatiques

Officiellement, les constructeurs automobiles sont en règle avec la législation européenne qui vise à limiter les émissions à 130gCO2/km en moyenne en 2015 . La réalité est tout autre : sur fond d’aggravation de la crise climatique, l’efficacité énergétique des voitures neuves (la flotte automobile étant responsable à elle seule de 15% des émissions de CO2 de l’UE) ne progresse plus pour la quatrième année consécutive selon une nouvelle étude de Transport & Environment .

La situation empire : l’écart entre émissions réelles et mesures d’homologation est passé de 9% en 2001 à 28% en 2012 et à 42% en 2015, et 45% pour les véhicules d’entreprises.

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Grand écart entre test en laboratoire et usage réel : le scandale de la consommation réelle de carburant

Dit autrement, les deux-tiers des avancées proclamées depuis 2008, année de l’introduction des règlements applicables au secteur automobile, ont été obtenus en manipulant les tests : les progrès réellement constatés sur les routes s’élèveraient à seulement 14,6 g/km, les 25,5 g/km restants étant purement du vent.

Les consommateurs et l’Etat sont lésés

En moyenne, la surconsommation des véhicules en usage réelle engendre un surcoût annuel de 549 euros en achat de carburant pour l’automobiliste, par rapport à ce que les résultats officiels des tests laissent espérer.

Les États et leurs budgets sont également lésés puisque la fiscalité automobile (le bonus et malus en France) est modulée en fonction du niveau d’émissions de CO2 des véhicules, sur la base de valeurs très éloignées de la réalité.

Mercedes, premier de la classe pour l’optimisation CO2

Tous les constructeurs dépassent de plus de 40% en moyenne les consommations affichées. Mercedes se distingue cette année encore par des résultats particulièrement éloignés de la réalité : en moyenne, la consommation des véhicules de la marque sont supérieurs de 54% à leur valeur d’homologation et l’écart atteint même 56% pour les voitures Mercedes Classe A et classe E.

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Mercedes : l’anomalie des tests de consommation de carburant

Or, parmi toutes les « marges d’optimisation » identifiées, il n’y a pas de facteur connu qui puisse expliquer les divergences supérieures à 50%. Des investigations devraient être menées pour éclaircir les raisons de ces écarts.

En cause : un système de test défaillant

Ces dépassements sont principalement dus aux défaillances du système de test, dont le protocole est trop laxiste et le cycle de conduite, qui date des années 1980, obsolète.

Dans une moindre mesure, les divergences sont également dues au suréquipement des véhicules mis sur le marché (sièges chauffants par exemple). Les constructeurs automobiles installent des technologies moins polluantes sur leurs véhicules produits en série que sur les véhicules testés en laboratoire. Surtout, c’est l’absence de véritable contrôle qui incite les constructeurs automobiles à déjouer les tests d’essai.

Pour s’attaquer à la racine du problème une réforme en profondeur du système de test est nécessaire. Les technologies permettant de réduire les émissions sont déjà disponibles, il ne manque plus qu’un cadre politique solide qui garantisse leur mise en œuvre :

  • Un système de surveillance du marché automobile, pour contrôler les émissions de CO2 des véhicules une fois qu’ils sont mis sur le marché.
  • Une autorité de contrôle européenne indépendante des constructeurs automobiles pour veiller à la bonne mise en œuvre de la législation européenne après des années de manquement de la part des autorités nationales d’homologations.
  • Enfin, pour lutter efficacement contre les changements climatiques tout en renforçant notre indépendance énergétique, une nouvelle réglementation sur les émissions de CO2 des véhicules doit être fixée pour 2025 et assortie d’un test de mesure des émissions de CO2 en conditions réelles de conduite.

Notes

  1. Agence Européenne de l’Environnement, CO2 emissions from cars and vans : all larger manufacturers met their 2015 targets , décembre 2016
  2. Transport & Environment, Mind the gap ! 21 décembre 2016 Le rapport compare les données publiées par l’Agence européenne de l’environnement en décembre 2016 avec des données réelles concernant un million de véhicules renseignées par les automobilistes sur des sites de consommations et analysées par ICCT.
  3. La Commission européenne doit proposer une nouvelle réglementation pour limiter les émissions de CO2 des véhicules d’ici juillet 2017. Un test RDE, real world driving émissions est prévu en 2017 pour mesurer les oxydes d’azote (NOx) mais pas le dioxyde de carbone (CO2).
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