Comment la France abandonne son industrie automobile, ses emplois et son ambition climatique ?
« Quel avenir pour l’industrie automobile européenne ? » C’est la question centrale du dialogue stratégique organisé à Bruxelles et animé par Ursula Von der Leyen qui rend aujourd’hui ses conclusions.

A cette question, la réponse du gouvernement français et de la commission Européenne se résume à une position de défense des constructeurs automobiles historiques, Renault et Stellantis, et de leurs intérêts à court terme. Au risque de perdre de vue, une fois de plus, les intérêts de la filière, des salariés et des citoyens, qui attendent une offre diversifiée de véhicules électriques abordables produits en France.
Le bilan des dernières années parle de lui-même : d’un côté, les constructeurs ont affiché des résultats financiers records depuis la crise du Covid, avec des marges opérationnelles exceptionnelles, souvent à deux chiffres. La stratégie de Renault et Stellantis est limpide, maximiser les marges financières en délocalisant leurs activités et les emplois.
De l’autre, le prix des véhicules neufs s’est envolé et les émissions de gaz à effet de serre n’ont pas diminué[1]. En freinant la transition écologique du secteur, les constructeurs font subir les conséquences aux employés de la filière : Bosch, Valéo, Forvia, la SAM, Walor … la liste est longue et s’allonge au fil des jours. La filière automobile a perdu 100 000 emplois en 10 ans, entrainant une détresse sociale d’ampleur et la destruction d’écosystèmes territoriaux entiers.
Aujourd’hui, le gouvernement français valide la stratégie européenne qui assouplit les objectifs d’émissions pour 2025 et par la même occasion détricote les avancées du Green Deal. Etendre le calcul des émissions sur plusieurs années donne la latitude aux constructeurs automobiles de retarder encore le passage au véhicule électrique. C’est pourtant une course contre la montre qui est en cours, face aux autres constructeurs internationaux et face au changement climatique.
Cette politique se situe dans la continuité de ce qui été fait depuis plusieurs décennies, avec des aides financières conséquentes au secteur, sans contrepartie, et des ajustements court-termistes sans aucune vision de l’industrie dans 10 ans. Ces mêmes ingrédients qui ont conduit, en France, à une destruction méthodique du tissu industriel et des savoir-faire.
Il est temps que les pouvoirs publics remettent au centre de leurs décisions les besoins des citoyens, l’intérêt général et l’avenir de l’industrie et ses emplois. Le cap fixé par le Green Deal oriente l’économie vers la la neutralité carbone d’ici 2050. C’est la clé de voute de la réindustrialisation. L’enjeu des années à venir est de pouvoir produire des petits véhicules, soutenables et abordables pour la population.
Ensemble, syndicat et organisations environnementales, nous tirons la sonnette d’alarme. Bientôt il sera trop tard. Trop tard pour redresser notre tissu industriel, trop tard pour préserver les savoir-faire et les emplois en France ou pour tenir nos objectifs climatiques, trop tard pour résister à la concurrence internationale.
Il est encore temps : convoquez les autres parties prenantes à la table des discussions pour tracer un avenir résilient pour tous, plutôt que se risquer à suivre les appétits financiers de court terme de quelques-uns.
Signataires :
- Réseau Action Climat
- CFDT
- Transport & Environnement
- Fondation pour la Nature et l’Homme
[1] Brief commun syndicats et ONG, Faut-il encore écouter les constructeurs ?

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