En novembre dernier, Emmanuel Macron a rassemblé à l’Elysée les chefs d’entreprises des 50 sites industriels français les plus émetteurs de CO2 pour les inciter à accélérer leur décarbonation.  Ces industriels ont rendu leur feuille de route à la Première Ministre vendredi dernier lors du Conseil national de l’Industrie et les montants en jeu sont pharaoniques : 50 milliards d’euros pour décarboner l’industrie dont 30 milliards pour les 50 sites les plus émetteurs. On ignore encore le niveau de participation de l’Etat à cet effort financier, au-delà du doublement de l’enveloppe de 5.6 milliards d’euros promis par Emmanuel Macron en novembre dernier.

Pourtant, de nombreuses aides existent déjà et leur impact réel sur la décarbonation des sites mérite d’être évalué. Le Réseau Action Climat met en évidence les montants engagés via les fonds européens et les appels à projets français, parmi les multiples mécanismes de financement existants. Enfin, des fiches thématiques proposent un focus sur les sites les plus émetteurs et les entreprises qui n’ont pas encore engagé de réduction de leurs émissions. Une mise à jour de ce bilan sera réalisée chaque année. 

Beaucoup d’argent public pour peu de décarbonation

Depuis 2005, les sites industriels émettant du CO2 ont reçu des crédits carbone gratuits dans le cadre du marché carbone européen, permettant à certaines industries de réaliser d’énormes profits, parfois de plusieurs millions, voire milliards d’euros (comme dans le cas d’ArcelorMittal).

En parallèle, les mécanismes de financement publics se sont multipliés à l’échelle française et européenne : plans France Relance et France 2030, Fonds Innovation européen, fonds de transition juste, fonds FEDER. 

Les grands sites industriels d’Arcelor Mittal, de Yara ou encore de Vicat bénéficient de la plupart de ces plans de financement sans pour autant amorcer de réduction de leurs émissions de CO2.

Repenser et responsabiliser l’industrie

Le secteur industriel, en raison de son empreinte carbone considérable, joue un rôle clé dans l’atteinte des objectifs nationaux de réduction des émissions de CO2. Pourtant, les avancées concrètes se font toujours attendre. Malgré des investissements publics astronomiques, la réduction des émissions de CO2 reste limitée.

Dans ce contexte, il devient essentiel d’exiger des contreparties de la part des entreprises percevant des aides publiques, telle que l’atteinte d’objectifs concrets de décarbonation.

Par ailleurs, les engagements de décarbonation de  l’industrie française ne seront crédibles que s’ils évitent le pari coûteux du “tout technologique” sans revoir le niveau de production. Ces solutions, telles que le captage et stockage du carbone sont coûteuses, énergivores et ne sont pour le moment pas déployables rapidement à l’échelle du pays. Dans ce sens, la sobriété et l’économie circulaire doivent constituer les axes majeurs de la politique de décarbonation de l’industrie française.