Programmation pluriannuelle de l’énergie : le CLER et le RAC s’inquiètent d’un manque de cohérence avec les objectifs de la loi de transition énergétique

Alors que Ségolène Royal a réaffirmé son souhait de revenir aux objectifs initiaux du projet de loi et que l’Assemblée nationale les a rétablis par voie d’amendements, les exercices de programmation en cours, pilotés par l’Administration de la DGEC, comportent des biais inquiétants.

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Segolène Royal, ministre de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie.

Le scénario « énergie-climat » à l’horizon 2035 dit « AMS2 » élaboré par la DGEC, censé permettre de combler l’écart entre les objectifs de la future loi et les moyens qu’elle propose, marque un certain nombre d’avancées et parvient à une réduction de 22% de la consommation d’énergie en 2030 par rapport à 2012. Mais alors qu’il se montre particulièrement volontariste au point de n’être pas crédible, faute de mesures adéquates, sur certains secteurs comme la rénovation des logements, il manque curieusement d’ambition sur le report modal dans les transports, de la route vers le rail ou encore de la voiture vers le vélo, et refuse d’utiliser d’autres instruments pourtant incontournables. Pire, certains lobbies continuent à remettre en cause les objectifs de la loi et s’activent pour repousser les économies d’énergie à plus tard.

Un levier fiscal tabou

C’est notamment le cas de la fiscalité climat-énergie qui reste tabou alors qu’avec une augmentation progressive et constante de la composante carbone des taxes sur la consommation, un rattrapage entre le diesel et l’essence ou encore une taxation du kérosène pour les vols intérieurs, compensables par une baisse de la fiscalité sur d’autres secteurs, un signal clair serait donné qui aurait un effet certain, à la fois sur les émissions de gaz à effet de serre et sur la réduction du déficit de la balance commerciale.

Par ailleurs, une prise en compte très partielle des effets systémiques comme le contenu énergie-carbone des matériaux utilisés dans le BTP ou les émissions indirectes de l’agriculture intensive, fragilise les résultats, tandis que l’absence d’alternative aux carburants pétroliers pour les transports interurbains (poids lourds et véhicules légers) conduit à une impasse majeure, alors que l’on sait désormais que le gaz renouvelable (biométhane) offre la seule solution de substitution vraiment crédible.

Encore un frein aux énergies renouvelables

Malgré ces lacunes, ce scénario constitue le travail de prospective le plus avancé mené à ce jour par le ministère et doit à ce titre impérativement servir de référence en terme de consommation d’énergie pour l’élaboration de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) qui va fixer la feuille de route des 8 années à venir pour toutes les filières de production. Sans ce plafond, le risque est grand que l’on parvienne à des niveaux de production fossile et nucléaire supérieurs aux besoins, avec pour conséquence quasi-certaine un frein au développement des énergies renouvelables.

Pour le CLER et le RAC, c’est bien le niveau de consommation d’énergie en 2030 du scénario AMS2 qui doit fixer une trajectoire maximale de demande en face de laquelle la PPE doit décliner l’évolution des moyens de production jusqu’en 2023. Pour Anne Bringault, en charge de la transition énergétique pour le CLER et le RAC, « Face au double objectif de réduction de la consommation d’énergie et de développement des énergies renouvelables, dont la crédibilité est de plus en plus affirmée, les lobbies des énergies du passé s’agitent et brandissent la menace de la sécurité d’approvisionnement. C’est justement maintenant qu’il faut rester ferme et tenir le cap de la transition vers un modèle énergétique plus sobre, moins polluant, créateur d’emplois et d’innovations et plus proche des territoires. »

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